Pourquoi s’entêter à aller dans l’espace ?

À ce stade, nous savons tous et toutes qu’aller dans l’espace n’est pas une mince affaire. Il faut déployer des moyens considérables, aussi bien en temps, en argent et en efforts, pour accomplir cette tâche dangereuse. Il s’en trouve souvent d’ailleurs pour question la légitimité de cette entreprise. Alors, quel intérêt à aller dans l’espace ? 

La gloire, le dépassement de soi et le besoin du défi sont souvent utilisés comme justifications pour l’exploration spatiale, notamment aux États-Unis 1. Si le goût de l’exploit peut effectivement captiver l’attention du grand public, notre exploration de l’espace poursuit également des buts un peu moins… vaniteux ! En effet, les clés de nombreux mystères scientifiques, et les réponses à de nombreuses questions existentielles, se trouvent dans l’espace… 

Savoir d’où l’on vient

Notre origine, pas seulement en tant qu’humain mais en tant que seules formes de vie technologiques que nous connaissons, est encore pleine de mystères. Or c’est nous-mêmes, les êtres vivants terrestres, qui avons effacé les traces de notre émergence au fil du temps 2. Pour trouver d’autres indices, il faut aller dans l’espace.   

  • L’énergie du Soleil : La vie telle que nous la connaissons n’existerait pas sans l’énergie du Soleil. Or, si nous comprenons les grands principes de fonctionnement de notre étoile, beaucoup de ses subtilités nous échappent encore. Pour mieux les connaître, il faut l’étudier, si possible depuis l’espace !
  • La matière terrestre : La Terre et ce qui la constitue, l’autre composante capitale de notre existence, ne vient pas de nulle part. Cependant, tout ce qui la constitue a été altéré au cours des âges, d’une façon qui n’est pas encore totalement comprise. Pour ce faire, il faut étudier des [« restes » de la formation du système solaire qui ont été moins altérés], comme les astéroïdes !
  • L’eau, source de vie : D’où vient l’eau terrestre ? Cet élément essentiel à la vie telle que nous la connaissons est abondant à la surface de notre planète, ce qui paraît étrange étant donné notre proximité au Soleil. Nous commençons à peine à former des hypothèses sur l’origine de l’eau terrestre, qui serait peut-être cométaire. En tout cas, sans cette eau, nous ne serions pas là !
  • L’origine de la vie elle-même : nous savons désormais grâce à certains de nos engins spatiaux que des molécules organiques se trouvent à l’intérieur d’astéroïdes et de comètes 3. Bien entendu, une molécule organique n’est potentiellement qu’un élément « précurseur » de la vie, qui peut l’alimenter mais n’en a aucunement la complexité. Mais, et si ces molécules étaient arrivées sur la Terre primordiale sur des roches stellaires ? Et dans ce cas, comment se sont formées ces molécules ? Les réponses sont dans l’espace, et pourraient éclairer nos origines…

Savoir où l’on va 

Nous sommes actuellement à la croisée des chemins stellaires : nous sommes pile à la bonne distance du Soleil, à l’heure actuelle, pour avoir des températures clémentes et de l’eau liquide… Mais les choses auraient pu être très différentes, et elles finiront par le devenir… 

  • Sauver la Terre et nous sauver nous-mêmes : Le plus imminent danger concernant notre belle planète ne vient pas de l’espace ; c’est nous 4. Nos actions ont déjà bouleversé (et dégradé) notre monde, notamment sa biodiversité et son climat. Saisir l’étendue de notre impact passe par l’espace, avec des engins capables de mesurer nos actions, et de nous donner des pistes pour les contrer (Hélas, la volonté politique d’appliquer ces pistes, elle, ne pourra venir que de nous…).
  • Destin à la Vénus : Vénus, à la fois si similaire et si dissemblable à notre monde ; l’étoile du berger fait presque la taille de la Terre et partage l’essentiel de sa composition, et pourtant c’est un enfer étouffé dans un effet de serre hors de contrôle. Elle disposait pourtant peut-être d’un océan d’eau liquide dans son passé 5… Qu’est-ce qui a mal tourné ? La Terre pourrait-elle connaître le même destin ? La réponse passera par l’étude de notre proche voisine. 
  • Futur martien : Mars aussi a connu un destin bien différent de celui de notre monde natal. C’est désormais une planète parfaitement mortelle, froide, sèche, quasi-inactive… Alors que sa surface indique qu’elle fut un temps peut-être aussi hospitalière que la Terre ancestrale. Les hypothèses se multiplient pour expliquer ce destin contrarié… et la possibilité qu’il se reproduise ailleurs. Pour trancher, il faudra plus encore travailler sur la planète rouge. 
  • L’expansion du Soleil : Au-delà d’un réchauffement à la Vénus ou d’un refroidissement à la Mars, le destin de la Terre sera peut-être de finir consumée (et consommée !) par le Soleil. En effet, en vieillissant et en brûlant son combustible, notre étoile grossit lentement 6. Cette augmentation de la taille du Soleil aura sans doute un effet dévastateur sur notre planète, dans plusieurs milliards d’années… Mais comment préciser ces détails ? Des études spatiales plus poussées sont à prévoir pour, qui sait, espérer enrayer cette fin… 

Ne plus être seul•e  

L’univers paraît immense et désespérément vide : pour l’instant (cet article est publié début 2024), nous ne connaissons aucune forme de vie qui ne soit pas apparue sur Terre… Pourrons-nous mettre fin à notre horrible sentiment de solitude cosmique ? Des réponses pourraient déjà exister dans le système solaire, en cherchant bien !

  • D’autres « genèses » biologiques, sur Mars et Vénus : On l’a déjà évoqué, Vénus et Mars ont probablement accueilli de l’eau liquide à leur surface. Est-ce que ce fait crucial, combiné à d’autres facteurs (température clémente, champ magnétique…), a permis à la vie d’émerger à leur surface, même si rien n’en survit que des fossiles ou des traces chimiques ? Le savoir, ce qui serait déjà un triomphe en soit, nous indiquerait aussi que la vie n’est peut-être pas si rare dans l’univers… 
  • Des formes encore vives sur les lunes glacées : De la vie extraterrestre encore bien vivante pourrait encore exister dans le système solaire à l’heure actuelle. Peut-être pas sur Mars, mais sous l’épaisse banquise de lunes telles que Europe et Ganymède, Titan et Encelade ou même Triton. On sait désormais que ces astres glacés encapsulent d’immenses océans d’eau liquide mêlés de divers composés chimiques. De la vie, même microscopique, pourrait-elle y exister ? Pour le savoir, il faut mener plus d’études sur place ! 

1    https://www.jfklibrary.org/about-us/social-media-podcasts-and-apps/jfk35-podcast/season-2/jfk-and-the-space-race/transcript 

2   https://www.smithsonianmag.com/science-nature/earth-earliest-life-fossils-stromatolites-180974442/ 

3   https://www.universetoday.com/164264/under-some-conditions-comets-could-deliver-organic-molecules-to-planets/ 

4    https://phys.org/news/2023-10-life-earth-existential-threat-climate.html

5   https://www.newscientist.com/gallery/2009july14-venus-express-map/ 

6    https://www.spacecentre.nz/resources/faq/solar-system/sun/getting-bigger.html